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les mots de Momo
15 octobre 2020

LOURD LÉGER.

           Ils sont trois ; normal c’est un trio. Ils descendent les gradins de l’amphithéâtre pour rejoindre la scène où trône le piano. La violoniste et le pianiste sont vêtus de discrets mais élégants costumes noirs. Lui aussi, mais pour l’habiller il aura fallu le double, voire davantage, de tissu que pour ses deux acolytes. Le violoncelle dont il jouera tout à l’heure semble un modèle réduit entre ses mains.

Encyclopédie Larousse en ligne - violoncelle

            Ils sont installés. Le pianiste s’assure d’être à la bonne distance de son instrument. La violoniste accorde le sien. Lui s’assoit, pose délicatement la pique de son violoncelle sur le sol, vérifie que c’est la bonne position, tourne son visage, que l’on qualifierait de poupin s’il n’y avait ce collier de barbe, vers le public. Ce simple geste fait cesser le brouhaha de conversations feutrées.

            Ils vont interpréter des pièces de Haydn et de Mendelssohn. Il veut attirer l’attention sur un détail : la fameuse pique qui permet de poser et de stabiliser le violoncelle. Pendant longtemps les musiciens tenaient celui-ci entre leurs genoux et, pour mieux le caler, utilisaient le pouce de la main gauche. Le résultat en était que seul le haut du manche, au-dessus de la caisse de résonnance, pouvait être utilisé, privant le grave instrument de ses notes plus aigües et celui qui en jouait d’un cinquième doigt. Petit objet, grand changement.

            Le plus surprenant n’est pas dans le contenu de l’information, mais dans la voix qui la donne. Une voix suave, davantage de ténor que de baryton, toute de douceur, comme un murmure à l’oreille de chaque spectateur. Une voix à la Claude Villers pour ceux qui se souviennent d’avoir écouté, lorsqu’ils étaient plus jeunes, des émissions intitulées Marche ou Rêve ou Le Tribunal des flagrants délires. Une voix qui, à l’entendre, ne préjuge en rien du physique de son propriétaire.

            Le concert a débuté. Des pièces musicales dont même un néophyte devinerait la complexité, des allures parfois de danses tsiganes échevelées, des enchaînements de notes virtuoses pour le pianiste, la violoniste, mais aussi pour lui dont les doigts courent sur le manche, de bas en haut, de haut en bas, dont l’archet tantôt caresse les cordes, tantôt les frotte en nerveux va-et-vient, tantôt les bouscule d’amples mouvements du bras. Les notes volent comme des bulles de savon. Oublié l’homme trop corpulent. Oubliée cette chair trop généreuse. Il est le musicien qui fait chanter son instrument, il est l’instrument, il est violoncelle, il est musique.

            Il est légèreté.

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  • Il s'agira de donner des avis sur des lectures et sur des événements culturels en général. Mais des éléments portant sur l'actualité ou sur des voyages ne seront pas oubliés. Le tout, si possible, avec de l'humour et de l'humeur.
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