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les mots de Momo
8 février 2013

COINCIDENCES

Ce qu'on appelle coincidence, est-ce seulement le fruit du hasard ou est-ce qu'on les provoque ? Je m'explique. Il y a quelques temps je m'entretenais ici du Misanthrope monté au TNB par Jean-François Sivadier. Et puis, il y a eu Alceste à Bicyclette, ce - n'en déplaise à Télérama - délicieux film de Philippe Le Guay où Fabrice Lucchini et Lambert Wilson dissèquent la scène 1 de l'Acte I du même Misanthrope. Rassurez-vous, ils ne font pas que cela, mais belle idée que de passer au crible toutes les nuances du texte, toute sa richesse, selon que ce soit l'un ou l'autre qui le dise, selon ce qu'ils y mettent, de ton et d'eux-mêmes ! Bon ! On peut reprocher au film certaines longueurs, une fin en forme de pirouette, des facilités par moments. Cela n'enlève rien au charme qui s'en dégage. Et quelle belle idée de titre ! Et puis, il y a eu ce matin Fabrice Lucchini, invité par Patrck Cohen sur France-inter. Pas spécifiquement pour parler du film... Mais ils en ont parlé. Et puis il y a, toutjours au TNB, le Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostant, mis en scène par Pitoiset et interprété, dans le rôle titre, par Philippe Torreton. Vous me direz, quel rapport du Misanthrope à Cyrano. Le rapport, ce n'est pas moi, mais Pitoiset lui-même qui l'établit dans la plaquette de présentation distribuée à l'entrée de la salle. Et c'est vrai qu'Alceste et Cyrano se battent contre tout le monde, qu'ils ont tous deux horreur de l'hypocrisie, qu'ils ne supportent pas la moindre compromission. Sans compter, mais c'est une autre histoire, qu'ils sont l'un et l'autre malheureux en amour.

La pièce de Rostand est brillante, pleine d'esprit, de réparties cinglantes. Apte à séduire tout amoureux du langage (et vous aurez compris que je le suis !). Elle tient en grande partie sur les épaules du comédien qui interprète Cyrano. Et ici, Torreton ne l'interprète pas. Il l'incarne ! Tour à tour drôlatique et pathétique, virevoltant et songeur, caustique et sérieux, gouailleur et puriste, ferrailleur et rimailleur. Tout est si juste, si naturel, qu'on en oublie que la pièce est en vers, des alexandrins. Je ne reviendrai pas sur la polémique avec Depardieu. Juste tout de même pour dire que Gad ElMaleh avait, dans un tweet, traité Torreton de "petit". C'est tellement plus facile de tweeter que de jouer Cyrano. Gad, quand tu réussiras à faire ce que Philippe (me voilà familier d'un seul coup) fait, alors tu seras crédible.

Fermons la parenthèse ! Il n'y a pas que Torreton, il y a tous ceux qui l'entourent, d'une grande cohérence dans l'interprétation. On peut se poser des questions sur les choix de scénographie (où se trouve-t-on ? Un hôpital psychiatrique ? Une cantine ?...), de costumes (banlieue XXIème siècle ? Gascogne XVIème siècle ?...). J'avoue ne pas toutjours avoir saisi les intentions du metteur en scène. Mais il y aussi une telle inventivité ! Un tel foisonnement ! Une telle vie que lorsque le spectacle se termine, au bout de 2 heures 40, on ne s'est pas ennuyé une minute, on a entendu le texte. On l'a parfois redécouvert bien qu'on en connaisse des passages par coeur et notre coeur a battu au rythme de celui de Cyrano, de Roxane, de tous les autres. La salle applaudit, debout. Bravo les artistes !

Et, si avant d'entrer dans la salle, l'état du monde pouvait pousser à la misanthropie, lorsqu'on en sort, on a changé d'avis... Au moins pour un moment.
Magie du texte. Magie des mots. Magie de leur intréprétation, de leur incarnation. Magie du théâtre quand il est de cette qualité.

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